Les inondations ne sont plus de rares accidents climatiques. En 2025, elles touchent une large partie du territoire, et près de trois communes sur quatre ont déjà été reconnues en catastrophe naturelle au moins une fois ces trente dernières années. Avec le changement climatique, les épisodes de pluies intenses se multiplient.
Ce guide vous accompagne, étape par étape, pour savoir comment vous préparer, réagir en cas de crue et reconstruire dans de meilleures conditions.
Se préparer avant la montée des eaux
Anticiper l'inondation de son logement, c’est avant tout limiter les dégâts — matériels et humains — lorsqu’elle surviendra. Quelques aménagements bien pensés peuvent faire une vraie différence.
Adapter votre logement
Commencez par identifier les équipements sensibles : tableau électrique, chaudière, VMC, prises, pompe à chaleur. L’idéal est de les positionner au-dessus du niveau d’eau estimé, voire à l’étage. Il est aussi possible de séparer les circuits électriques entre les pièces potentiellement inondées et le reste du logement, pour pouvoir couper localement le courant.
Les gestes à envisager :
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Installer des barrières amovibles (batardeaux) devant les ouvertures du rez-de-chaussée, en respectant la hauteur maximale recommandée.
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Calfeutrer les aérations basses avec des sacs de sable ou des obturateurs adaptés.
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Équiper les canalisations de clapets anti-retour pour éviter les remontées d’eaux usées.
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Prévoir une pompe de relevage dans le sous-sol, reliée à une alimentation de secours.
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Stocker les produits polluants en hauteur et sécuriser les cuves de fioul ou de gaz.
Côté matériaux, privilégiez ceux qui se nettoient facilement et résistent à l’eau : carrelage, enduits lavables, plinthes en PVC, isolants hydrophobes. Cela réduira les travaux en cas de sinistre.
Organiser un refuge et prévoir l’essentiel
Aménagez une zone refuge en hauteur, à l’étage ou dans les combles, située au-dessus des niveaux de crue les plus hauts enregistrés dans votre commune. Elle doit être accessible depuis l’intérieur et permettre éventuellement une évacuation par l’extérieur.
Constituez un kit d’urgence comprenant :
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de l’eau potable et des vivres pour trois jours ;
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une lampe torche, une radio à piles, une trousse de secours ;
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vos papiers d’identité et documents importants numérisés ou plastifiés ;
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des vêtements de rechange, des batteries de secours et des médicaments si besoin.
Chaque membre du foyer doit savoir où se trouve ce kit, et comment l’utiliser.
Faire évaluer les risques chez vous
Si votre commune est couverte par un plan de prévention du risque inondation (PPRI) ou un programme d’actions de prévention (PAPI), vous pouvez faire réaliser un diagnostic de vulnérabilité inondation.
Ce diagnostic est financé en partie par le Fonds Barnier, et permet d’identifier les aménagements prioritaires à effectuer pour sécuriser votre logement.
Construire ou rénover en zone inondable
Les règles d’urbanisme en zone inondable sont strictes, et elles priment sur les dispositions du plan local d’urbanisme. Le PPRI distingue généralement deux grandes zones.
En zone rouge, les constructions nouvelles sont interdites. Il s’agit d’espaces trop exposés ou nécessaires au débordement naturel des cours d’eau. En zone bleue, les constructions sont autorisées sous conditions. Le rez-de-chaussée ne doit pas accueillir de pièce de vie, les équipements doivent être installés hors d’eau, et le plancher du premier niveau habitable doit être situé au-dessus de la cote de crue centennale, majorée d’une marge de sécurité.
Les sous-sols sont en principe interdits. Les matériaux, l’implantation du bâti, la circulation de l’eau, tout est réglementé dans les moindres détails. Un permis de construire sera refusé si votre projet ne respecte pas ces prescriptions.
Pendant la crue : protéger les personnes avant les biens
Quand l’eau commence à monter, tout va très vite. La priorité absolue est de rester en sécurité.
Voici les bons réflexes à adopter :
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Suivez les consignes des autorités via la radio, les alertes mobiles et les réseaux sociaux institutionnels.
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Ne vous déplacez pas, même à pied. Rejoignez la zone refuge prévue chez vous.
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Ne descendez jamais dans un sous-sol, même brièvement.
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Coupez l’électricité et le gaz si cela peut être fait sans danger.
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N’utilisez aucun appareil électrique ni flamme nue, utilisez une lampe à piles.
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N’allez pas chercher vos enfants à l’école, même si l’instinct vous y pousse : ils sont pris en charge sur place.
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Réduisez l’usage du téléphone : privilégiez les SMS, réservez les appels aux urgences vitales.
Après la crue : nettoyage, démarches, reconstruction
Une fois l’eau retirée, commence une phase délicate. Quelques précautions s'imposent.
Avant de réintégrer votre logement, assurez-vous que la structure est stable. Ne remettez pas le courant sans avis d’un professionnel. Faites également vérifier les appareils de chauffage, le gaz, et l’état du réseau électrique.
Ne buvez pas l’eau du robinet sans confirmation officielle. Utilisez de l’eau embouteillée et jetez les aliments qui ont été en contact avec l’eau ou qui n’ont pas été conservés au froid.
Démarches d’assurance
Vous devez :
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Photographier les dégâts pièce par pièce avant tout nettoyage.
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Établir une liste précise des biens endommagés, avec les factures ou preuves d’achat si vous les avez.
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Prévenir votre assureur dès que possible, par téléphone ou via votre espace client, puis confirmer par courrier recommandé.
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Conserver les objets endommagés jusqu’au passage de l’expert.
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Transmettre votre déclaration de sinistre dans les 30 jours suivant la publication de l’arrêté de catastrophe naturelle.
Une fois les démarches effectuées et votre dossier complet, l’assurance vous versera une première avance sous deux mois, puis le reste dans les trois mois. La franchise est de 380 euros pour un particulier.
Nettoyage et séchage
Travaillez en sécurité : portez des gants, des bottes, un masque. Commencez par enlever la boue et les débris, puis nettoyez à l’eau claire, avant de désinfecter à l’eau de Javel. Aérez les pièces pendant et après le nettoyage.
Le séchage doit être progressif et contrôlé. Si nécessaire, utilisez des déshumidificateurs. Surveillez l’apparition de moisissures et retirez sans tarder les matériaux imbibés d’eau depuis plus de 48 heures : moquette, laine minérale, placo...
Reconstruire durablement
C’est le moment idéal pour repenser certains choix techniques, afin d’être mieux préparé à la prochaine crue.
Voici quelques pistes à intégrer dans votre rénovation :
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Repenser l’électricité avec une installation "descendante", depuis le plafond.
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Utiliser des matériaux résistants à l’eau dans les pièces basses (béton cellulaire, carrelage, enduits à la chaux).
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Prévoir des cloisons démontables dans les zones exposées.
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Installer des systèmes permanents ou semi-permanents de protection : seuils rehaussés, batardeaux, pompes automatiques.
Des aides publiques peuvent vous y aider. Le dispositif MIRAPI, par exemple, lancé en 2024, permet d’être accompagné dans la rénovation et la demande de subventions.
Les aides financières disponibles
Voici un tableau récapitulatif détaillé des aides financières disponibles en 2025 pour les sinistrés des inondations :
Dispositif | Bénéficiaires | Objectif / Ce que ça couvre | Montant ou taux de prise en charge | Délai / Modalités | Où s’adresser |
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Garantie Catastrophes Naturelles (Cat Nat) | Toute personne ou entreprise assurée par un contrat multirisque habitation ou professionnel | Dommages directs causés par l’inondation : bâtiment, mobilier, équipements ; frais de pompage, nettoyage, relogement temporaire (si prévu au contrat) | Franchise légale de 380 € pour les particuliers | 30 jours pour déclarer après la parution de l’arrêté Cat Nat ; indemnisation en 2 étapes : avance sous 2 mois, solde sous 3 mois | Votre compagnie d’assurance |
Fonds Barnier (FPRNM) | Propriétaires de biens en zone PPRI ou zone couverte par un PAPI ; collectivités locales | Travaux de réduction de la vulnérabilité prescrits ou recommandés par un diagnostic ; achat amiable de maisons trop exposées ou sinistrées à plus de 50 % | Jusqu’à 80 % du montant des travaux (ou 100 % pour une acquisition amiable) ; avance possible de 30 % | Dossier à monter via la mairie ou la DDT (Direction départementale des territoires) | Mairie / DDT / préfecture |
Aide exceptionnelle de l’ANAH | Propriétaires occupants ou bailleurs, dans les communes reconnues en catastrophe naturelle ; sous conditions de ressources | Travaux de remise en état non couverts par l’assurance ; amélioration de la résistance à l’eau ; peut compléter le Fonds Barnier | Jusqu’à 90 % du reste à charge, selon les revenus du foyer | Dossier à déposer via un guichet unique après la publication de l’arrêté Cat Nat | ANAH / plateforme dédiée / mairie |
Dispositif MIRAPI (depuis 2024) | Ménages sinistrés dans certaines régions pilotes (Pas-de-Calais, Gard, Var, etc.) | Accompagnement personnalisé pour le diagnostic, les travaux anti-inondation, et la demande de subventions (Barnier, ANAH…) | Accompagnement gratuit ; les travaux sont ensuite financés par les aides classiques | Déploiement progressif selon les régions ; inscription dès après l’événement via la plateforme MIRAPI | Mairie / site du ministère de l’Écologie |
Aides locales exceptionnelles (département, région, communes) | Tous les ménages sinistrés selon critères locaux ; pas toujours soumis à conditions de ressources | Aides ponctuelles : remboursement de franchise, relogement, équipements de première nécessité, chèques alimentaires | Montant variable selon les collectivités (ex. 380 € dans le Pas-de-Calais en 2023) | Généralement déclenchées dans les jours suivant la catastrophe | Mairie / conseil départemental ou régional |
Conseil pratique : pensez à vous signaler comme sinistré en mairie rapidement après l’événement. Cela facilite l’accès aux guichets uniques, aux aides locales, et vous permet de bénéficier plus rapidement de l'accompagnement prévu par les collectivités ou l'État.
Aujourd’hui, les inondations ne sont plus un scénario hypothétique. Vous ne pouvez pas les empêcher, mais vous pouvez agir dès maintenant pour en limiter les conséquences. En anticipant les risques, en connaissant les bons gestes à adopter, et en vous appuyant sur les dispositifs d’aide existants, vous êtes en mesure de protéger votre foyer et de reconstruire plus sûr.